Arts, Design

VILLA NOAILLES

INTERIEURS MODERNES

Cette exposition, qui présente les chefs-d’œuvre de la collection de design moderne du Musée national d'art moderne - centre de création industrielle du Centre Pompidou, retrace l’aventure de la modernité en France, dans les années 1920-1930, à travers la révolution de l’espace domestique.

Au début du XXe siècle, les salons présentent sous forme d’« ensembles » les objets de mobilier dans une scénographie de l’intérieur où tout se répond : objets de mobilier, objets d’art, objets décoratifs, tapis, tissus, couleur, lumière, etc. Le métier même d’« ensemblier » recouvre tout à la fois artiste, décorateur, architecte. Le mouvement moderne, qui accompagne les processus de rationalisation et l’industrialisation du design, aboutit dans les années 1920 à la crise de l’« artiste-décorateur », conduisant, en 1929, à la création de l’UAM (Union des artistes modernes) qui réunit tous les grands noms de la modernité : Robert Mallet-Stevens, Le Corbusier, Charlotte Perriand, Sonia Delaunay, Pierre Chareau, Eileen Gray, etc., unis par un même syncrétisme, prônant le dialogue entre les arts, les arts décoratifs et l’architecture.

La transformation de l’espace intérieur trouvera également dans le cinéma un dispositif d’exposition et un outil de communication privilégié de ces changements de paradigme dans la perception de l’intérieur.

À la fin des années 1920, l’intérieur se rationalise, se désencombre. Le décor fait place à une conception globale qui sera celle de l’équipement moderne, qui se substitue à l’ornementation des salons décorés de « bibelots ». Charlotte Perriand réalise ses premiers équipements, où les objets s’intègrent à l’architecture, appelant à libérer l’espace, tandis que Le Corbusier exhorte à « désencombrer » l’intérieur avec ses « meubles-casiers ». En 1929, Le Corbusier et Charlotte Perriand présentent leur « équipement d’habitation au Salon d’automne. Les murs se transforment en meubles ; les meubles coulissent, se donnent dans leur modularité et adaptabilité. L’esthétique des paquebots et des machines nourrit alors une nouvelle grammaire de formes épurées, avec de nouveaux matériaux, tels que l’acier tubulaire dans le sillage du Bauhaus. Tissus et revêtements laissent visible la structure des objets. Le rapport du corps à l’espace se transforme ; le corps est à présent dynamique et sa déambulation modifie l’ergonomie des objets. Le Corbusier parle d’« objets-membres », telles des extensions prothétiques du corps. Pour lui, l’Esprit nouveau passe par le « renouveau de l’espace intérieur » et « de nouvelles manières de s’asseoir ». Les objets de mobilier se donnent comme des dispositifs amovibles, ainsi chez Charlotte Perriand, Pierre Chareau ou Eileen Gray. S’adaptant aux usages du corps en mouvement, ils sont mobiles, comme les chariots roulants d’Eileen Gray.

Le cinéma, la mode, l’architecture des nouvelles villas sont le témoignage de cette nouvelle modernité qui va de pair avec des architectures en béton, qui s’ouvrent sur l’extérieur. La modernité est air, lumière, mouvement. Dans les années 1920, la villa Noailles, construite par l’architecte Robert Mallet-Stevens à Hyères, fait l’éloge de la dynamique des corps à travers le sport et l’hygiénisme. La villa E1027 d’Eileen Gray (1926-1929) à Roquebrune-Cap-Martin arbore une esthétique de paquebot, s’ouvrant tout entière sur la lumière et la mer. La notion d’intériorité fait place à des intérieurs qui se prolongent à l’extérieur, dans la nature, à travers de grandes baies vitrées, des toits-terrasses ou des terrasses-jardins. L’architecture s’est muée en « enveloppe » où intérieur et extérieur se donnent dans une même continuité spatiale. La « machine à habiter » corbuséenne se nourrit de l’extérieur : la nature est devenue la modernité elle-même. Dans les intérieurs convergentainsi tous les enjeux du modernisme et de sa dialectique entre machinique et organique. Ce catalogue d’exposition explore de nombreuses facettes de l’intérieur moderne en France dans les années 1920-1930 : son héritage des arts décoratifs, son articulation aux avant-gardes, sa dimension syncrétique, impliquant toutes les dimensions de la création ; l’esthétique de la machine et les métaphores de la modernité, telles que le paquebot ; la nouvelle notion de confort ; le rôle de la lumière et de la couleur dans les intérieurs, sous l’influence du néoplasticisme hollandais ; les salons de l’UAM ; la chambre d’enfant, entre refuge et exploration du monde, ainsi que le rôle de la nature comme élément décoratif et comme artifice.

Diplômé en 2004 de l’école Nationale Supérieure des Arts Décoratifs de Paris avec les félicitations du jury, Joachim Jirou-Najou est finaliste en 2008 du concours Design Parade 03 organisé par la villa Noailles avec qui il collabore depuis de façon régulière à la conception de scénographies d'expositions.
Après avoir partagé son activité entre une collaboration auprès de Pierre Charpin et des projets personnels entre 2004 et 2012, il crée son studio au début de l’année 2013.
Le dessin est pour Joachim Jirou-Najou un élément fondateur de sa pratique du design et trouve des résonances dans de nombreux projets et collaborations.
Il s'associe régulièrement à des éditeurs, notamment Habitat pour qui il dessine différents projets ou encore la société danoise EO avec le tapis « Bear » et la table basse Floe qui signe le début de sa collaboration avec la Galerie kreo.
Élu l’un des 10 créateurs de l’année au salon "Now ! design à vivre" en 2010, il a été par ailleurs lauréat de la Bourse Agora pour le design avec le collectif Dito en 2007 dont il est l'un des membres fondateurs. Joachim Jirou-Najou a été résident des Ateliers de Paris de 2013 à 2015. Deux de ses projets, la série Portée et le déguisement Nours, ont par ailleurs été acquis par le Centre National des Arts Plastiques (CNAP) pour les collections du Fonds National.